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Vies
d'Addis
Le
soleil tape continuellement sur Addis Abeba, la capitale de
l'Ethiopie. Les rues sont encombrées d'auto-bolides peu préoccupées
par la sécurité des piétons.
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Les nuages
de poussières, les gaz d'échappement, ainsi que l'altitude (2100 m)
imposent une respiration essoufflée. A tous les coins de rue, devant
les boutiques et les lieux de culte, aux arrêts des bus, des mendiants
: aveugles, enfants, estropiés, déformés, familles entières... L'Ethiopie,
triste pays de la Corne de l'Afrique, traîne sa réputation de misère,
de famines et de guerres.
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Odeurs
d'Addis
Il
règne dans Addis une odeur improbable mais omniprésente.
Mélange olfactif complexe qui tient du mastic gras pour
fenêtres et du sous-bois humide. L'odeur des miséreux
?
Addis
apparaît comme un point de pèlerinage de tous les mendiants
de la Terre. Ils occupent les trottoirs de la ville,
en familles entières, ou regroupés par vices de forme.
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"You,
you, mister, give me money. Mother dead, father dead".
C'est le refrain classique, le "Frère Jacques" des enfants de
la rue à l'approche des visiteurs étrangers. Une denrée bien
trop rare pour nourrir toute la population. Si rare que les
pickpocket locaux, mal entraînés, échouent à chaque tentative. |
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Querelles
de paroisses
Dès
6 heures du matin, la ville s'éveille au son des appels à
la prière. Mais ici, ce n'est pas un muezzin du haut de son
minaret. C'est un prêtre, chrétien orthodoxe, la religion
la plus pratiquée. Cette Eglise, soeur de la confession copte
d'Egypte et architecturalement influencée par l'Eglise arménienne,
a pris ses quartiers en Ethiopie depuis 17 siècles.
Les chrétiens représenteraient actuellement 50 % de la population
éthiopienne, pour 40 % de musulmans.
Les deux religions vivent en intelligence. Ces dernières années,
seuls quelques heurts sporadiques, insignifiants, ont ponctué
leur cohabitation.
Certains parlent pourtant d'une surenchère de ferveur. Les
orthodoxes craignent de perdre leur suprématie. L'évolution
démographique penche en faveur de la confession musulmane.
Elle prend notamment de l'ampleur dans le milieu stratégique
des affaires. D'autant que les Emirats Arabes, investisseurs
proéminents, jouent les grands frères et participent au développement
des infrastructures.
L'Etat reste quant à lui fondamentalement laïc. Une conception
héritée de la période communiste.
Préservée des conflits religieux, malgré sa situation de chrétienne
parmi les pays musulmans, l'Ethiopie doit faire face aux différents
ethniques. Le pays en compte une quatre-vingtaine. Tensions
accentuées par la politique de décentralisation que mène le
gouvernement en application de l'adage "diviser pour mieux
régner".
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Ethiopie/Erythrée,
match nul
Tension contenue, mais à fleur de peau, avec le voisin Erythrée.
Cette ex-région de l'Ethiopie accède à l'indépendance en 1993.
Elle devra se battre à plusieurs reprises pour préserver son
autonomie. Le dernier conflit, guerrier de 1998 à 1999, a pris
fin en décembre 2000. Ce différend est peu soutenu par
la population éthiopienne qui souhaiterait vivre en paix avec
les erythréens. D'autant que l'Ethiopie et l'Erythrée paient
cher leur engagement armé. Les deux pays se retrouvent parmi
les plus pauvres de la planète. Les dépenses militaires ont
grevé leurs économies. En 1999, le ministère éthiopien de la
Défense engloutissait 39 % du budget national, et encore 22
% en 2000. Lueur d'espoir : le statu quo semble respecté des
deux côtés. |
L'Ethiopie
subit également les effets de famines périodiques. Situation
longtemps entretenue par le gouvernement qui y trouvait son
compte en détournant l'aide internationale.
Le gouvernement en place a amorcé une opération "mains propres"
dans les hautes sphères pour lutter contre la corruption. Et
gagne progressivement la confiance de la population. |
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Culture
millénaire sous-exploitée
L'Ethiopie
souffre de la mauvaise gestion de son principal potentiel : une
culture millénaire. Tant qu'elle n'est pas transformée en tourisme,
cette richesse ne vaut pas grand chose sur le marché des valeurs
internationales .
L'Ethiopie est régulièrement affublée de l'appellation "berceau
de l'humanité". Un terme justifié dans de nombreux domaines.
C'est ici qu'a été exhumé le squelette de Lucie, longtemps considérée
comme la première présence humaine sur Terre (et détrônée depuis
peu).
Le pays est également un berceau du christianisme. Au-delà,
la légende raconte que l'Arche d'alliance, qui contient les Tables
de la Loi (où sont inscrits les Dix Commandements) serait actuellement
en sécurité dans un monastère à Aksoum. Le grand Salomon de Jérusalem
aurait confié l'Arche à son fils Ménelik (né de la reine de Saba,
une éthiopienne) dix siècles avant Jésus-Christ. Personne ne peut
le vérifier car les lieux sont surveillés par des prêtres chrétiens.
(voir le National Geographic, version française, de juillet 2001
: www.nationalgeographic.com
).
Le pays héberge aussi la source du mythique Nil Bleu qui alimente
le Grand Nil. Les pouvoirs maléfiques et magiques du Nil Bleu ont
fait émerger une véritable religion en Ethiopie.
Autre valeur potentielle : la multiplicité d'ethnies. Certaines
d'entre-elles, notamment dans la vallée de l'Omo, conservent des
modes de vie primitifs. Les ethnologues en raffolent. Les photographes
y figent leurs meilleurs clichés (voir Cérémonies d'Afrique de Carol
Beckwith et Angela Fisher, aux éditions de la Martinière : www.lamartinière.com
).
Est-ce le métissage de ces ethnies qui a engendré tant de beautés
dans la population ?
Portraits sans commentaires :
L'Ethiopie,
pays décalé, qui possède son propre calendrier (ils sont actuellement
en 1994), son propre décompte des heures (il est 0 heure au levé
du soleil, déjà 6 heures du matin sur nos montres), et son propre
alphabet de 33 lettres qui composent l'amharique, la langue nationale.
Autant
dire que ce n'est pas seulement un pays. C'est un trésor.
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